Yeeeeeeaaaaaahhhhhhh ! On a parcouru la face Est de La Esfinge !
Il est de ces belles plantes qui demandent davantage d'attention que la moyenne. La Esfinge est de celles-ci, sans aucun doute. On aurait du s'en douter : toutes les cimes andines sont masculines (LE Pisco, LE Chopicalqui, etc.), sauf LA Esfinge qui est féminine. Un peu comme une capricieuse qui vous rappelle à l'ordre dès qu'elle se sent méprisée. C'est ce qu'elle a voulu nous faire réaliser il y 10 jours, lorsque nous nous sommes rendu à ses pieds une première fois. C'était entre 2 sommets, a la va-vite, plein d'impatience et sans attention pour ses couleurs, ses formes et ses humeurs. En nous envoyant la neige toute la nuit, elle avait alors trouvé le moyen de nous rappeler que grimper sur ses hanches de granit était une chance, presque un honneur, et que cela demandait de la patience et de la témerité. Bref, on avait peut etre pas compris le message mais le fait est qu'on est allé voir ailleurs quelques jours (cf. Chopicalqui) avant de revenir, une seconde fois, tout à fait conscients que c'est elle qui déciderait si on allait pouvoir la découvrir dans son intimité ! Et à notre grand bonheur, elle a été plutot séduite puisqu'elle nous avons offert des conditions idéales pour parcourir la voie de 1985 en une seule journée !
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Durant l'approche face au Huandoy. |
Cette voie a été la première ouverte (en 1985) à La Esfinge qui en compte désormais une douzaine. Il s'agit de l'itinéraire le plus régulièrement gravi aujourd'hui sur cette face qui est considérée comme "le" bigwall des Andes. La plupart des autres voies n'ont jamais été répétées. La voie de 1985, c'est en fait l'itinéraire le plus "facile". Pourtant, depuis que l'on se prépare pour la parcourir, ses cotations nous ont toujours un peu impressionné : elle est cotée ED - 6A/A1 oblig. et fait 750 mètres (entre 20 et 22 longueurs) entre 4700 m et 5350 mètres d'altitude ! Cette voie est rapidement devenue le fil conducteur de notre projet andin, tout en sachant qu'on n'y arriverait peut-etre pas. Mais on savait qu'on pouvait essayer de la parcourir, notamment grace au materiel spécialement offert par PYRENEX, lequel permettait d'envisager un bivouac dans la paroi, au milieu de la voie. En deux jours, l'ascension devenait possible pour nous. Mais c'est finalement en une longue journée de 14 heures d'escalade qu'on l'a parcourue, d'une traite ! On espère que la généreuse capricieuse n'en sera pas vexée :)
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Flo et le mal des montagnes, une longue histoire ! |
Cela faisait plusieurs jours, depuis notre première aller-retour à ses pieds, que l'idée de tenter cette voie à la journée nous trottait dans la tete. On n'était pas certain de pouvoir la boucler sans avoir à sortir la frontale mais notre bonne forme physique nous encourageait à essayer. Parcourir cette face à la journée avait l'avantage de simplifier la logistique (éviter le hisssage des sacs comprenant vetements chauds, eau et nourriture pour 2 jours) mais impliquait de limiter le poids, donc de sortir à tout prix le jour meme car le materiel emporté (2 petites doudounes, 3 litres d'eau, 4 barres chocolatées et quelques cacahuètes) auraient été limites pour passer la nuit à cette altitude. Mais on avait rencontré une cordée ayant fait la voie dans la journée et à notre tour, on était surmotivés !
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Rémi dans la première longueur. |
On ne peut pourtant pas dire que cette deuxième tentative avait commencer au mieux. Cette fois-ci, nous avions décidé de me pas s'arreter au camp de base et avions prévu de dormir sous un immense bloc de granit oú un "bivouac" confortable a été sobrement aménagé à 4700 m d'altitude, soit à 300 mètres de la paroi et du départ de la voie. Cela devait nous permettre de fixer les 2 premieres longueurs la veille et de gagner presque une heure au petit matin, donc une heure de soleil et de lumière de plus. Mais Flo a été gaté. Dès notre arrivée au bivouac, Flo a été pris d'un gros mal de casque qui l'a sonné plusieurs heures. Puis en pleine nuit, il a été obligé de se lever, le bide chahutant. Le mal au ventre persisitera au levé et jusqu'au pied de la voie puisque, quand meme décidés à se lancer dans la voie, nous attaquons l'escalade de la paroi a 7h00. Soit une 1h30 de retard sur notre programme ! D'habitude, on se fout pas mal de la montre. Mais là, on savait qu'on pourrait regretter ce retard ... la nuit, dans les Andes, est noire de chez noire dès 18h. Alors disons qu'on avait prévu, dans notre petit sac à dos, des piles de rechange pour la frontale ! Et on a bien fait ...
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Flo redescend de la deuxieme longueur le premier jour. |
La voie est divisée en 2 parties bien distinctes que nous avons décidés de nous partager pour exploiter au mieux nos complémentarités : Flo a donc grimpé les 350 premiers mètres oú dominent des fissures raides et physiques (soutenu dans le 6B), puis Rémi a terminé les 400 mètres restants à l'itinéraire hasardeux et pas toujours faciles à protéger. Tout s'est vraiment bien passé et on s'est régalé. C'est une voie magnifique et variée, sur un granite d'excellente qualité. Quelle chance de savourer une voie qui nous a tant fait rever depuis Toulouse. On aurait pu etre décu. Mais LA Esfinge sait avoir la classe ...
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Au bivouac. |
Concernant l'horaire, il nous restait encore 3-4 longueurs lorsque nous avons sortis les frontales. On s'est alors un peu perdu dans cette immense face mais bon, c'était pas non plus compliqué : on savait que la sortie était en haut ! On a sans doute emprunté quelques variantes de la voie originelle sur la fin. Il a fallu nettoyer quelques fissures pour pouvoir poser des protections, car certains passages n'etaient sans doute pas les bons. Mais il nous fallait avancer, un point c'est tout. Parce qu'il faisait de plus en plus froid ! On a bien compris que grimper de nuit à plus de 5000 mètres, mains nues et en petits chaussons, implique de prendre en compte d'autres paramètres que le seul niveau "technique" d'escalade ! "Eh Flo, t'as vu ?! On a les habits qui sont tous congelés ! Ca caille macarel !" Et pourtant, personne ne nous a obligé à etre ici. On l'a choisi ! Ca fait partie du truc, disons. Parce que le truc en question, c'est à dire ce type d'ascension, est quelque chose de génialissime. Un vaste et long moment hors du temps et pourtant bien réél. A peine le temps de penser à ca que nous voilá au sommet ! On est au sommet de La Esfinge ! Punaise que c'est bon ces moments là. Il est un peu moins de 21h.
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Depart de la troisième longueur. |
Dans la nuit noire et le froid, les rappels de descente, les éboulis et la recherche de ce fameux "gros bloc" qui fait office de bivouac (et abrite tout notre matériel depuis hier soir) nous prend un peu de temps. Mais on s'en fiche, on rentre de La Esfinge, heureux. On rentre de La Esfinge, heureux. On rentre de La Esfinge, heureuuuuuuuuxxxxxx !!!!
La suite en images :
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Remi au depart du diedre au dessus de la vire. |
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Le soleil nous quitte en beaute. |
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Au sommet!!!!!! |
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Adiou Esfinge... |
Bravo les gars! On est fier de vous même si c'est inutile et que nous y sommes pour rien.... superbes photo, je suis jaloux!
RépondreSupprimerMathieu et Anne
Jolie métaphore ! C'est super que vous ayez réussi, quelle aventure, félicitations !
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