jeudi 7 juillet 2011

Vent et neige au Chopicalqui


Le Chopicalqui (6353m).
Et de deux ! Non non, il n'y a aucune erreur, puisqu'on ne parle pas de sommet gravis (le "troisieme" sinon) mais bel et bien de "but", comme on dit, c'est à dire que nous n'avons pas réussi à fouler le sommet convoité pour la deuxième fois d'affilée. On est donc de retour sur Huaraz, avec un peu moins de sourire que d'autres fois. C'est un peu idiot, sans doute. On se dit forcément que ce voyage dans les Andes ne peut se résumer au nombre de sommets gravis ; on se rappelle aussi que l'on a toujours privilégié le temps passé en montagne, l'expérience générale, à la "réussite" de "l'objectif" lui-meme, pour utiliser des mots que l'on aime pas trop. Ok. Mais quand meme ... au delà des belles idées, il y a qu'on est bien dégoutés de ne pas avoir osé aller jusqu'au bout ! Tout cela laisse un peu songeur ... contrairement à notre manière d'emvisager les sorties en montagne, pourquoi attacher de l'importance, aujourd'hui, au fait de ne pas etre arrivés jusqu'au sommet ? Parce que l'on sait qu'on ne vient pas tous les jours dans les Andes ? Parce que ce sommet aurait été notre premier "6000 m" et que c'est inconsciemment un cap symbolique important ? Parce que c'est le second retour sur Huaraz "bredouille" après la Esfinge ? Ou encore, parce que dans le cadre de cette expé, via ce blog, on partage nos "succès" plus facilement que nos demi-tours sous le sommet ...
 
Car l'histoire du CHOPICALQUI est effectivement une histoire de demi-tour sous le sommet ! On était pas loin, bon sang. Mais le mauvais temps, encore lui, nous a gentiment mais "insistamment" (sic) inciter à retourner sous la tente se réchauffer dans les duvets plus rapidement que prévu !

Pendant la montee au camp morraine.
Nous étions arrivés lundi dans la Quebrada Llanganuco (la meme que pour le Nevado PISCO). Meme si c'est long, lent, parfois usant et toujours couteux, on commence maintenant a prendre le rythme de ces allers-retours entre Huaraz et les différentes vallées de la Cordillère Blanche. Plus on s'approche de la Cordillère et plus on a confirmation de la noirceur du ciel. Un taxi-piste (comme un taxi-brousse mais en plus rocailleux !) nous dépose à un virage avec nos gros sacs : ici commence le sentier en direction du CHOPICALQUI ... sous la pluie ! On dépasse rapidement le camp de base qui n'est qu'à 30 mn pour monter sur l'une des plus belles moraines qu'il nous ait été donnée de voir. Malgré les embruns, les rafales de vent et la capuche (bien étanche!) de nos vestes imperméables, on distingue pile en face de nous mais assez loin, l'emplacement du Camp 1 ("camp morraine"). Situé à 5000 m d'altitude, il nous faudra 2h30 de marche au visage fouetté par des rafales d'humidité devenant progressivement piquantes de grésil pour l'atteindre. Difficile d'en profiter dans ces conditions, mais le site est superbe : coincé entre les glaciers du Chopi et du Husacaran, la plus haute montagne des Andes (6768 m), ce camp 1 est abrité des chutes de séracs, de pierres et de tout autre objet avalancheux par une grand barre rocheuse depuis laquelle coule un intime filin d'eau. Sous l'effet du vent, le grésil hésite entre neige et pluie ... le montage du camp, notamment de la tente, est des plus aventureux ! Une petite accalmie en fin de journée permet de prendre quelques photos et de constater que beaucoup de neige est tombée au dessus de nous, sur le Chopicalqui. On se couche tot, bercés par les rires aussi curieux que communicatifs d'une cordée de guides péruviens et équatoriens qui ont leur tente a 10 mètres de nous. Ils sont eux aussi là pour tenter le sommet avec 2 clients des USA. Il y a également une expé commerciale de 3 tentes, 4 porteurs-cuisiniers et 1 guide pour 2 clientes espagnoles !


Le camp morraine 5000m.

La nuit est, comment dire ? ... humide. Donc neigeuse en altitude. Mais le soleil se lève finalement dès le petit matin et on dejeunera meme au soleil ! Parfait pour faire sécher les affaires ... avant de refaire les sac et de repartir en direction du camp 2 ("camp Hielo"). Les deux autres groupes, bien plus "professionnels" que nous, sont prets rapidement. Tant mieux, qu'ils partent devant : on profitera ainsi d'une belle trace dans la neige fraiche tombée sur le glacier. On les rattrape finalement assez vite et, ne pouvant refuser de passer devant sous prétexte qu l'on profite de leur trace, on se retrouve devant. L'ambiance est plutot sympathique et bonne enfant.


Direction le camp hielo avec le Chopi en toile de fond.

On arrive assez vite au camp 2 qui n'est en fait qu'une zone, plutot plane et de la taille d'un terrain de tennis, située en plein milieu du glacier à 5550 m. Il est à peine midi, ce qui veut dire qu'il va falloir poiroter tout le reste de la journée devant la tente, les fesses dans la neige et sous le soleil écrasant ! Mais on est content qu'il soit là celui-là, parce qu' a cette altitude, le moindre nuage nous oblige à mettre la doudoune. Le temps passe finalement assez vite entre le terrassement pour la tente, la fonte de neige pour voir de l'eau et les discussions avec les 2 expés qui nous entourent. Ils se mettent à nous appeler "Los jovenes" alors qu'aucun d'eux n'a de barbe :) On crame ainsi toute la journée sous un soleil très fort jusqu'à ce que celui-ci nous offre un spectacle ahurrissant au moment de se coucher. La grosse expé commerciale installée au dessus de nous a trop cuisiné et nous offre les restes : ce soir, c'est soupe au fromage et spaghettis bolognaises à 5550 m ! Après ca, plus grand chose à faire dans ce quartier. Couché a 18h23 !

Entre le camp morraine et le camp hielo.
Tout a gelé pendant la nuit à l'intérieur de la tente. Meme les duvets sont craquelés par le givre ! On se lève plein d'enthousiasme parce qu'aujourd'hui, eh eh, veinards que nous sommes, on monte au Chopicalqui et ses 6353 m ! En dormant a 5550 m, il ne reste pas grand chose et puisqu'on se sent en grande forme, ca ne devrait aller assez vite. D'autant plus que futés que nous sommes, nous avons gentiment laisser partir les deux autres groupes devant pour qu'il fasse la trace, au moins la première moitié ! Ben quoi, c'est ca etre "professionnel de la montagne", non ?!
 
On part a 3h15 de nos tentes, soit 1h45 après eux. Tout se passe bien. La nuit est noire mais les frontales permettent de percevoir le relief du glacier sur lequel on évolue. Dans un premier temps, de nombreux passages raides mais courts en neige dure rendent l'ascension plus technique. Et puis arrive une traversée assez longue et couchée dans laquelle on perd la trace de nos amis. Ca avait bien fonctionné jusque là ! On retrouve leurs pas de temps a autre, mais le vent devient de plus en plus puissant et fait tourner la neige en tourbillon. On met la cagoule en version intégrale mais la ñoustache et les sourcils gèlent quand meme ! Curieusement, c'est dans ces moments là qu'on remercie plus que jamais les "partenaires" de nous avoir donné du bon matériel permettant de ne pas souffrir du froid, pourtant très intense à ce moment là. Les rafales sont bien puissantes et arrivent meme ponctuellement à faire trébucher nos 65 et 75 kg ! Les frontales de nos prédécesseurs  apparaissent a quelques centaines de metres et nous aident à trouver le bon cheminement. On parvient rapidement jusqu'à eux, au milieu d'une pente raide surchargée de neige poudreuse. Avec ce vent de fou, il faut crier pour se parler ! "Hola ! Qué tal ? Qué viento de puta madre, no ?" "Si ! Vamos a bajar ! Demasiado nieve et demasiado viento !" Quoi ? Vous descendez ? Mince alors.

Traversee du glacier.
 Que faire ? Continuer seuls ou faire comme eux et rescendre ? Nous sommes aux alentours de 6000 m et on doit etre a une petite heure, à peine, du sommet. Mais les conditions sont vraiment difficiles, le vent violent et glacial, et il est clair que nous avons bien profité de la trace faite dans plus de 80 cm de neige poudreuse. On l'a d'ailleurs réalisé à chaque fois que le vent effacait les traces ! Il fait toujours nuit noire puisqu'il est 5h15. Attendre que le jour se lève nous passe par la tete mais trop de vent pour hésiter. Et puis continuer comme si de rien n'était, en les regardant battre en retraite dans ce contexte météo difficile de haute altitude ... pas si facile ... d'autant que les quntités de neige tombées les nuits précédentes sont impressionantes et que dans les passages raides, nos lames de piolets n'accrochent pas grand chose. Bref, on redescent rapidement. En une heure, nous sommes au camp. Le jour se leve et il y a moins de vent ici. Mais on voit tres bien, au dessus de nous, les gerbes de neige s'emvoler sur la crete, là oú nous avons renoncé à continuer. On fait chauffer un thé, sans trop parler. A-t'on bien fait de faire demi-tour ? Les regrets arrivent. Et si on y repartait maintenant ? Ou alors dans quelques heures, quand on verra que le vent s'est calmé ? On a effectivement pu constater notre bonne forme physique et le sommet nous semble vraiment tout proche. On est pret a faire l'aller-retour en courant dès que possible. Donc on attend, ici, au camp 2.



Le camp hielo.
La matinée est longue. Le vent ne faiblit là-haut. Toutes les possibilités passent par nos tetes. Les remords aussi, parfois. Les 2 autres expés plient leurs campements et redescendent. Elle nous laisse du gaz de rab, parcequ'on est d'abord décidé a passer une nuit supplémentaire en altitude pour tenter le sommet une nouvelle fois demain. Et puis on se ravise, les plans évoluent. Désormais seuls au camp 2, le programme de notre voyage se calcule. Le vent, lui, souffle toujours tres fort. Il atteint désormais le camp 2. On plie bagage et on rentre a Huaraz. Le retour sera long et de plus en plus venteux, jusque dans la vallée.


Apres l installation du camp, flo tente de recupere du mal des momtagnes.

Sur le chemin de descente, nous croisons 4 groupes de mexicains, d'espagnols, de slovènes et d'americains qui montent au camp morraine pour tenter le sommet les jours suivants. L'impression que la montagne fonctionne par wagon. Le camp laissé vide sera archi plein demain. Nous avons parti d'un wagon, un de ceux qui n'est pas allé au sommet. Peut-etre que le wagon que nous croisons en descendant sera un bon wagon ? Avant qu'un autre ne fasse demi-tour, à son tour. C'est curieux tout ca, hein ?



Humm, les bonnes pates preparees par nos voisins.

Heureux d'etre revenus à Huaraz, de manger comme des ogres et de dormir plus de 11h. Il fait un grand soleil et on est en pleine forme. Il ne nous reste plus que 8 jours que l'on compte bien vivre a fond ! Demain, nous repartons dans la Quebrada Paron pour tenter une derniere fois de parcourir la face Est de La Esfinge. Il nous faudra davantage de chance concernant la météo. Pour le reste (forme, motiv, etc.) on s'en occupe ! On en a meme à revendre ! A dans 5 jours !
 
 
CHOPICALQUI. Ah la la, ce CHOPICALQUI ... quelle histoire ...




Magnifique couche de soleil.

On profite de ce spectacle.


Desescalade des pentes du glacier entre les deux camps.


Le chemin taille sur le fil de la morraine




 

Adios Chopi.



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire